Héros de la Cybernation
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  Just say know

Parallèlement, le long de la M25 aux environs de Londres, des milliers de gens se rassemblent pour vivre un événement tribal de conscience communautaire : la rave. Mark Heley, organisateur de raves considère ce phénomène comme quelque chose d’un peu plus profond qu’une simple fête. Authentique mutation culturelle, «ces rassemblements techno-païens des années 80 innovent en écrivant le chapitre 2 qui fait avancer le projet initial des années 60» comme l’explique Cinnamon Twist, raver de San Francisco. Les points communs : rejet de certaines valeurs d’une société de consommation hiérarchisée.


Les teufeurs se sont appropriés le meilleur de la technologie, ses outils : vidéo projections sur écrans géants, imagerie fractale, son parfaitement dosé, smart drinks… Prolongement de l’ Acid Test des Merry Pranksters sixties, les raves de la fin du siècle y introduisent les cybertechnologies pour en amplifier l’esprit. Mark Heley est pour beaucoup dans le mariage de la technoculture et de la cyberculture. Tout comme Jaron Lanier, véritable figure de la réalité virtuelle portant tranquillement ses dreadlocks de shaman. Tous utilisent les technologies de pointe pour altérer la conscience. Burning Man au Texas, Toon Town à San Francisco, Earthcore en Australie, et tant d’autres raves diffusent leur vibration cyberdélique autour de la planète !

Car dans les raves, il se passe vraiment quelque chose de puissant. L’énergie de milliers de personnes fusionne. Les ravers sont ouverts, connectés, spontanés. On s’amplifie les uns les autres dans ce cercle libérateur. Certains ressentent une transmission interdimensionelle d’énergie, de sons, de musique, de mantras… Concentrés sur la musique, hors du temps, branchés sur le cyberespace, bodhisattvas connectés à l’absolu dans cette expérience commune… Ce partage d’espace cérébral collectif est rendu encore plus agréable et efficace par une nouvelle molécule, le MDMA. Emanation contemporaine des mystères d’Eleusys, finalement l’Acid house porte bien son nom. Conçue avec beaucoup de précision pour activer certaines zones du spectre d’altération de la conscience, le MDMA ou Ecstasy se concentre sur une élévation de l’empathie, un sentiment d’adéquation avec l’univers, comme l’expose Bruce Eisner, auteur instruit en la matière. Il s’agit de la nouvelle génération de psychotropes, moins directe que le LSD, conçue pour servir d’extension cyberdélique. Les sites d’Hyperreal du Lycaeum et d’Erowid proposent de véritables encyclopédies alternatives pour approfondir le sujet.

John Lilly Sasha Shulgin

Moins controversés, les smart drinks et le mouvement des nootropes trouvent également un écho favorable auprès des teufeurs. Dans sa buvette de limonade pour psychédélisés de Toon Town, Ürth Gürl propose des boissons et produits destinés à conserver la bonne humeur, augmenter l’énergie, entretenir la vibration, l’équipement nécessaire pour huit heures de transe nocturne. De John Lilly, inventeur du caisson d’isolation et chercheur passionné, à Sasha Shulgin, chimiste et pharmacologiste qui a synthétisé des milliers de composés psychoactifs, des scientifiques poursuivent l’amélioration du corps en tant que machine biochimique. Pourquoi ne pas tenter d’aller mieux quand on va bien ?

Ca change de ce qu’on peut lire dans la presse sur le sujet, non ? Les produits psychédéliques encouragent les gens à remettre en cause les convictions actuelles prédominantes, c’est pourquoi l’état les interdit. Les raves et le cyberespace peuvent changer le monde, d’où la peur de Big Brother qui fait tout son possible pour brider le mouvement. Il se sent menacé quand les commun des mortels s’empare des outils de l’intelligence. Qu’il s’agisse de révélations activées par une molécule d´Ecstasy ou par les nouvelles technologies de la communication tels qu’Internet et la réalité virtuelle, les gens peuvent partager des hallucinations solidaires, se contenter d’être eux-mêmes et refuser de s’en laisser conter. «Cette prise de conscience fragmente la réalité consensuelle, la balkanise et pose un problème à l’autorité en ouvrant d’autres perspectives».

Rappelez-vous le Criminal Bill passé par la Grande Bretagne contre le mouvement alternatif et les ravers, qui interdit les rassemblements de «personnes écoutant de la musique répétitive» ! Agissez contre la loi Mariani qui permet maintenant de saisir les sound systems des organisateurs de free parties en France ! Ces décrets ridicules essayent de tuer toute velléité de résistance, de restreindre un peu plus la liberté individuelle, mais il existe des moyens de contourner/hacker le système. Cherchez un peu et vous en inventerez aussi. Exemple : Dans LXIR, Guillaume Dustan a utilisé son talent d’écrivain et son amour de la provoc pour proposer une liste de mesures libératrices au gouvernement (sic!), qui comprend la légalisation totale de toutes les drogues, dont les psychédéliques.

Kevin Alexander, Rebels «A Journey Underground », 1998, diffusé par Canal Jimmy en mai 2002

 Voir l'article sur L'Idéaliste
 
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